Skip to main content

Le San Juan est une réplique d’une épave de baleinier de 1565 retrouvée à “Red Bay”, entre Terre-Neuve et les côtes du Labrador. Xavi Agotte, charpentier de marine, désirant ressusciter le patrimoine naval de l’Espagne et du Pays basque en particulier, a entrepris de construire ce navire en se basant sur les plans fournis par Parc Canada et issus de la longue recherche historique et archéologique canadienne. Xavi Agotte a pris possession d’un hangar sur la rive gauche du goulet de Pasaia, ce port proche de San Sebastian, et a créé à partir de rien une école de charpentiers, un hangar de construction de navire ancien, le tout réuni au sein de l’association Albaola. Malgré la difficulté de mobiliser des financements en Espagne, la construction du San Juan a débuté en 2014 et s’approche maintenant de la fin car il est envisagé une mise à l’eau en 2025.

Pettan (Bertrand en langue basque) au milieu de l’équipe JC2034

Par le truchement de Bertrand Harriague, notre fidèle guide basque à la verve inoubliable, nous avons pu visiter ce dimanche 26 mars le chantier du San Juan, avec les explications précises de Xavi Agotte dans un français impeccable. L’environnement du chantier est magnifique, le Pasaje entre les montagnes laisse entrevoir la mer agitée, alors que Alboala est lovée dans un arc du fjord basque. Sur l’eau naviguent en nombre des baleinières typiques basques emplies de rameurs solides qui s’entraînent en tirant fortement sur les avirons jusqu’au menton, et le soleil printanier est au rendez-vous alors que nous sonnons aux portes de Albaola.

Après la visite du musée en sous-sol qui nous explique le contexte de la pêche à la baleine au XVIème siècle par les marins basques, nous avons grimpé sur le San Juan en construction. Le San Juan, replet, rondouillard, est à l’image des navires de l’époque avec de belles courbes et une grande capacité d’emport. En effet, une fois les baleines attrapées outre-Atlantique, il fallait ramener le plus possible de barriques ! Le San Juan du XVIème siècle était un navire de 220 tonneaux, et les archéologues ont découvert qu’il avait été reconfiguré pour accueillir dans sa cale les baleinières (barques longues). On comprend donc que les armateurs avaient changé un morutier en un baleinier en démontant quelques barreaux et entreponts, ce qui rend au passage la tenue debout plus agréable dans le ventre du bateau.

Albola tient plus que tout à l’authenticité du navire. C’est pourquoi la reproduction est fidèle, même si les méthodes utilisées ne sont pas forcément d’époque. De même, la silhouette du navire n’a en aucun cas été retouchée pour parfaire une quelconque étude de stabilité. Seul impair commis : l’ajout de galvanisation sur les petits clous des bordés. En revanche, nous avons été estomaqué de découvrir que Xavi Agotte avait réussi à obtenir des affaires maritimes espagnoles un laisser-passer pour un navire sans motorisation ! Et pourtant le but de Alboala est de traverser l’Atlantique ! Le San Juan demeurera donc un bateau uniquement à voile, ce qui ne saurait être notre cas puisque les affaires maritimes françaises ne seront pas aussi conciliantes. 

Après la visite du navire, Xavi Agotte a eu la gentillesse de prendre trente minutes pour répondre à nos nombreuses questions. Il nous encourage sur notre projet en soulignant ce qui est pour lui le plus important : l’authenticité. Nous quittons Pasaia et la brise venant du Golfe de Gascogne pour remonter dans nos voitures, gardant sous le nez les odeurs de bois pendant quelques heures encore. Bravo Xavi pour ce merveilleux projet d’Albaola, mené contre vents et marées et qui va bientôt pouvoir s’envoler vers le Canada à la seule force du vent et de ces admirables marins et charpentiers basques.

Leave a Reply