Comment faisait-on pour se guider en mer pendant le moyen-âge ? Dès le XIIIème siècle apparaissent en Méditerranée ces cartes toutes particulières appelées les portulans. Le mot portulan n’est pas anodin, car il s’agit d’un outil de navigation précis et pratique permettant de se déplacer de ports en ports, ceux-ci étant notés sur la carte.
Contrairement aux cartes médiévales souvent symboliques, laissant place à l’imagination de l’artiste, les portulans sont précis et pratiques : chaque portulan trace les côtes avec une remarquable exactitude, au point que certaines cartes de la Méditerranée ressemblent encore aujourd’hui aux relevés modernes. Les terres intérieures sont souvent vides, car elles ne concernent pas le navigateur : seuls les littoraux, les îles, les passes et les mouillages comptent.
Quelques Portulans
Un des premiers portulans encore conservé de nos jours est cette carte dite “Pisana” datant de 1290, permettant probablement aux navigateurs génois de se diriger en Méditerranée.

Voici un autre exemple de portulan que j’ai pu observer au musée naval de Séville. Il s’agit de la carte de Mateo Prunes datant de 1563. Il représente toute les côtes de la méditerranée. On voit qu’au delà de l’aspect pratique de cette carte, l’esthétique est aussi devenu un enjeu pour ces créations du XVIème siècle, avec ces nombreuses fioritures pour combler les vides à l’intérieur des terres.

Il en est de même pour cette version méditerranéenne de Visconte Maggiolo de 1541, dessinant même des tentes sur les côtes africaines, et comme une mer rouge en lieu et place… de la mer rouge.

Dans ce grand siècle des explorations du XVIème siècle, les portulans ont évidemment accompagné les navigateurs en haute mer. C’est pourquoi nous retrouvons quelques portulans dessinant déjà les côtes outre-Atlantique, comme ce portulan du portugais José Reinel datant de 1519 (photographie du Fac-Simile visible au musée de Séville).

Les clés pour comprendre les portulans
Les portulans sont des outils précis de navigation qu’il faut pouvoir comprendre pour imaginer notre cher Jacques Cartier se dirigeant à Cadix ou Lisbonne pour ses affaires.
- Noms de ports et orientation

Les noms des ports ou des mouillages sont généralement écrits perpendiculairement à la ligne de côte, souvent en rouge ou marron. Les grands ports sont parfois aussi mis en valeur par un dessin représentant des murailles, comme dans cette version ci-contre:
- Rose des vents et lignes de Rhumb
L’important du portulan est aussi de déterminer sa route en fonction des vents.
Des roses des vents sont disposées sur la carte et sont sous-divisées en de multiples angles de vent : c’est ce qu’on appelle des lignes de rhumb ! Le vent pouvant de manière simplifié provenir de 32 directions de vent différentes, de 32 rhumb différents constituant le tour complet de la rose des vents.
Pour les mathématicien, disons qu’un rhumb correspond donc à 1/32 d’angle, soit 360°/32 = 11°15′
Pour les littéraires (accrochons-nous), nous dirons qu’un rhumb de vent peut correspondre par exemple à une direction Nord / Nord-Nord-Est ou bien Est-Sud-Est/Sud-Est.

De manière très pratique, puisque les roses de vents sont prolongées par ces lignes de rhumb qui quadrillent la carte, le navigateur pourra déterminer quel cap est nécessaire pour aller vers le port de son choix en alignant la carte et la boussole !
- Mais il y a un hic
Les premiers portulans sont remarquables par leur précision, mais ne permettent pas au marin de connaître sa position précise. Et le portulan se heurte à un problème de taille : ce quadrillage simpliste ne fonctionne que si la terre est plate. Car la rotondité de la terre déforme les lignes ! C’est bien pour cela que la cartographie moderne avec la projection de mercator transformera pour toujours la manière de représenter le monde, et que les portulans disparaîtront peu à peu.